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Nous avons rencontré des candidat-es qui se présentent dans le comté de Taschereau pour savoir qui sont ces hommes et ces femmes, quelles sont leurs idées et leurs priorités. Malheureusement, au moment de faire les entrevues, les candidats libéraux et écolos n’étaient pas encore désignés. Par Nicolas Lefebvre Legault Serge Roy, de Québec solidaire, habite le comté depuis plus de 40 ans, c’est un syndicaliste à la retraite. De 1996 à 2001, il a occupé la présidence générale du Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ). Depuis sa « retraite », il milite activement dans les réseaux de la gauche sociale. Agnès Maltais, du Parti Québécois, habite le quartier depuis un peu plus de 30 ans, c’est une femme de théâtre engagée. Elle a œuvré à la troupe féministe Les Folles alliées, a dirigé le Théâtre Périscope et La Bordée. Léger détail : depuis 1998, c’est la députée de Taschereau! Caroline Pageau, finalement, s’est beaucoup promenée, elle vient de Québec mais n’habite le comté de façon permanente que depuis 5 ans, c’est une traductrice autonome. Elle s’implique dans l’ADQ depuis 2002. Pauvreté et logement Les campagnes électorales sont surtout axées sur la classe moyenne, qu’est-ce que les candidat-es ont à offrir aux locataires à faible revenu du comté? Caroline Pageau nous informe que « l’ADQ n’a pas de mesure en tant que telle en matière de logement. » Par contre, plusieurs mesures de son parti pourraient intéresser les gens du comté pense-t-elle : « par exemple, nous proposons une allocation de 100$ par semaine pour les enfants qui ne fréquentent pas un CPE, nous proposons la gratuité scolaire aux parents d’enfants de moins de 18 mois, nous voulons lutter contre le décrochage en permettant aux écoles d’expérimenter des solutions novatrices, etc. » « Québec solidaire défend une perspective de lutte à la pauvreté qui s’articule autour de propositions concrètes, déclare Serge Roy, nous proposons de hausser le salaire minimum à 10$ de l’heure, de relever l’aide sociale pour couvrir les besoins essentiels, de construire 4000 logements sociaux par année, etc. » Agnès Maltais pense d’emblée au logement social : « il faut revenir avec de véritables programmes de logement social, mais on n’est pas un pays et on ne contrôle pas nos programmes, ça prend des moyens pour le faire. Nous, on veut un pays juste, instruit, vert et riche. Si on veut refaire des HLM, on a besoin de beaucoup d’argent. On veut encore faire du logement social mais il faut tous les outils, et, pour ça, il faut faire la souveraineté… » Priorités locales Quelles sont les priorités locales des candidat-es? L’émergence des gangs de rue inquiète Agnès Maltais : « je veux organiser un colloque pour connaître et comprendre le phénomène, ensuite il faut trouver des initiatives dans le milieu pour le combattre. On est un milieu qui se respecte et se prend en main, il n’y a pas lieu d’adopter le style de l’ADQ et de l’opération Scorpion.» Autre enjeu « local » important pour la candidate péquiste, le « mur-à-mur », « je veux m’assurer que les ministères abandonnent le mur-à-mur dans leurs interventions et comprennent les spécificités d’un centre-ville. Par exemple, le mode de développement des nouvelles places de garderie subventionnées (axé sur le milieu familial) ne convient pas à la circonscription qui, faute de grands logements, ne peut accueillir que des places en CPE. » Caroline Pageau fait également des gangs de rue sa priorité. Pour elle, la solution passe par l’offre de « milieux de vie », « il faut s’assurer que les organismes comme les Maisons des jeunes aient assez de ressources pour que les jeunes aient une place où aller. » Autrement, la candidate adéquiste mise beaucoup sur l’économie sociale pour dynamiser le milieu (et, ça, c’est dans le programme!). Pour Serge Roy, s’il y a un élement extrêmement important à surveiller dans le comté, c’est la spéculation immobilière. « Il faut prendre des mesures concrètes, il y a une explosion du logement de luxe, de condos très chers qui ne sont pas une solution aux problèmes de logement, explique-t-il, il faut éviter de créer des zones fermées, de faire du centre un ghetto de fortunés, c’est malsain. » Gauche / Droite La « montée de la droite » semble être le seul véritable enjeu de cette élection. Gauche / droite, qu’est-ce que ça veut dire aujourd’hui ? Est-ce toujours pertinent ? Pour Serge Roy, les notions de droite et de gauche sont fondamentales. « La droite représente un certain conservatisme, explique-t-il, la droite favorise un pouvoir hiérarchisé et autoritaire. » Et la gauche? « Pour moi, la gauche a une perspective généreuse qui favorise la répartition de la richesse, » dit le militant. À l’opposé, les notions de droite et de gauche n’ont plus de sens pour Agnès Maltais et Caroline Pageau. « Historiquement, la gauche n’est pas reconnue pour sa force en économie et, pourtant, elle a des choses à dire, explique Agnès Maltais, à mon avis, droite / gauche, c’est manichéen. » « Ça m’échappe, explique quant à elle Caroline Pageau, ce qui m’intéresse c’est des choses pratiques. » Pour la candidate de l’ADQ, il faut regarder les choses objectivement : « prenons le gel des frais de scolarité, ça profite surtout à une clientèle de classe moyenne et aisée, je ne vois pas en quoi c’est de gauche ». Pour Agnès Maltais, le monde n’est pas noir et blanc comme le voudrait une certaine gauche. « Il n’y a que des zones grises, pense-t-elle, ce qui compte ce sont les valeurs ancrées chez les individus, les miennes sont fortement balisées par la solidarité et le partage. » Du côté de l’ADQ, Caroline Pageau refuse les étiquettes : « je ne veux pas me dire de gauche parce que je trouve que les partis de gauche traditionnels n’aident vraiment pas le monde ordinaire, alors j’enlève les étiquettes et je me promene avec mon programme! » « Ma pratique et mes écrits me placent carrément à gauche et pas une gauche tiède ! », lance Serge Roy, qui est le seul à se définir sur un axe gauche-droite. Selon lui, « une politique de gauche est une politique qui permet aux gens de s’approprier collectivement suffisament de pouvoir pour organiser la vie en fonction de leurs intérêts et de leurs besoins». Pourquoi voter? Aux dernières élections, plus du tiers des électeurs et des électrices de Taschereau ne sont pas allés voter… « Il y a un ras-le-bol de comment ça se passe, pense Serge Roy, il y a un cynisme par rapport aux pratiques et à la conduite politique, les gens ne voient pas où ils peuvent s’impliquer et avoir prise sur la politique». La candidate du P.Q. pointe également le cynisme des électeurs. «Dans le mouvement anti-mondialisation, les gens disaient que le gouvernement a perdu le contrôle, illustre Mme Maltais, or, le seul moyen de reprendre le contrôle, c’est par la politique. » Agnès Maltais est formelle : « la rue ne vote pas de loi! Il faut reprendre confiance en la politique, l’investir pour établir un dialogue avec la rue mais, pour ça, ça prend des gens avec des valeurs sociales ancrées. Un gouvernement, ça marche au son. Il faut des gens pour entendre la rue. » & & & Pour le journaliste, « anarchiste convaincu » comme le dit Le Devoir, la réalisation de ces entrevues a été… divertissante! Ce fut notamment l’occasion de constater à quel point même les aspirant-es député-es sont « mêlé-es ». Les réponses de la candidate de l’ADQ, par exemple, furent pour le moins déconcertantes. Cette femme-là n’est pas à droite, c’est clair, alors qu’est-ce qu’elle fait à l’ADQ? Les réponses d’Agnès Maltais surprennent également : que l’une des candidates les plus à gauche du P.Q. (et de loin) nous dise que la droite et la gauche c’est dépassé laisse sans voix. Que faire le 26 mars? À vous de voir. Dans le fond, ce qui compte n’est pas tant ce que vous faites le jour du vote que les 4 ou 5 années suivantes. Comptez sur l’Infobourg pour vous tenir informés de la résistance qui ne manquera pas de naître et renaître peu importe la couleur du prochain gouvernement. == Extrait du numéro de mars 2007 du journal l'Infobourg