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Par Nadine Davignon Chaque hiver, les camions d’épandage s’activent dans nos rues, déversant des quantités impressionnantes de produits abrasifs. Les pentes abruptes du faubourg Saint-Jean-Baptiste sont en effet classées prioritaires dans les interventions de déneigement. Les citoyennes et citoyens saupoudrent eux aussi de sel le passage menant à l’entrée de leur logis. Ces produits sont-ils dangereux pour l’environnement? Nous avons fait le point sur la question. Le sel, vraiment naturel? D’emblée, on pourrait croire que l’utilisation d’un produit d’origine naturelle, le sel, n’est pas nocive pour l’environnement. En fait, le « sel » utilisé sur les routes est un mélange ajusté selon les conditions météo. De manière générale, les sels sont constitués de chlorure de sodium (NaCl) ou de chlorure de calcium (CaCl2) auquel on a ajouté un antiagglomérant, souvent le ferrocyanure. Les produits vendus aux citoyens et citoyennes sont similaires. On estime qu’environ 5 millions de tonnes de produits déglaçants sont utilisées chaque année au Canada, dont environ 71 200 tonnes sur le territoire de la ville de Québec. Le sel permet d’abaisser le point de congélation de l’eau, c’est-à-dire que l’eau salée gèlera à une température plus basse que l’eau douce. Les atomes composant le sel épandu sur une couche de glace interagissent avec les atomes de l’eau gelée. Cette «glace salée» se transforme en eau salée liquide. Cependant, quand il fait très froid, même l’eau salée gèle. Il faut alors intégrer des abrasifs au mélange, comme du sable et du gravier, pour que les surfaces soient moins glissantes. Des risques réels pour l’environnement Les sels se retrouvent dans l’environnement par différentes voies : l’entreposage, l’utilisation sur la chaussée et l’élimination de la neige usée. À la fonte des neiges, ils pénètrent aisément les eaux de surface et souterraines. Ils sont aussi transportés sous forme de poussière. En plus d’affecter nos réserves d’eau potable, l’eau salée modifie les milieux aquatiques, nuisant aux espèces présentes, tant animales que végétales. De nombreuses études montrent les impacts des sels de voirie sur l’environnement. Un rapport de Santé Canada publié en 2007 conclut que « les sels de voirie qui contiennent des sels inorganiques de chlorure avec ou sans sels de ferrocyanure sont considérés comme toxiques au sens de l’article 64 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999). » Compte tenu des très grandes quantités de sel utilisées annuellement, il y a lieu de s’inquiéter. Un groupe de travail piloté par Environnement Canada ainsi que l’association des transports du Canada ont proposé un guide des meilleures pratiques de gestion des sels de voirie. On y examine tout, de la planification à la machinerie d’épandage en passant par les produits de déglaçage. Québec a choisi de s’attaquer au problème en équipant ses camions de calibreurs, afin de connaître la quantité exacte de sel déversée sur la chaussée, ainsi qu’en offrant des formations à ses opérateurs. En effet, il n’est pas si simple d’évaluer la meilleure technique d’épandage en fonction des conditions routières. Depuis trois ans, une firme compile hebdomadairement les résultats de ces changements et, selon monsieur Serge Langlois, responsable du dossier à la Ville, les performances sont encourageantes puisque les quantités de sel utilisées tendent à diminuer. Les sels écologiques, une solution? De nouveaux produits ont fait leur apparition. Le sel Clearlane en est un exemple. Celui-ci est composé de chlorure de magnésium et d’une solution collante bleutée fabriquée à base de maïs. Ce « collant » permet au sel d’adhérer à la surface plus longtemps et, par conséquent, de moins se retrouver dans les fossés et de réduire de 20 à 30% les besoins d’épandage. L’action de ce sel est plus rapide. Il agit à des températures plus basses que le sel conventionnel. Le mélange n’a pas besoin d’antiagglomérant (ferrocyanure), ce qui est aussi profitable pour l’environnement. D’autres nouveaux produits sont en cours d’essai à Beauport, notamment Anti-icing et Bleu-fuzion. L’équipe municipale les analyse scrupuleusement. Monsieur Lavoie souligne que sans hausse significative des performances, sans réduction des impacts environnementaux et sans garantie d’un coût raisonnable, ces produits ne seront pas adoptés. La combinaison de nouveaux produits à la modification des techniques d’épandage semble constituer une solution prometteuse, mais pas miraculeuse. Malheureusement, nos modes de transport continuent d’entraîner l’utilisation de millions de tonnes de sel qui sont répandues dans l’environnement chaque année au Canada. Réduire, réutiliser... repenser! Pour les citoyennes et citoyens, la méthode la plus écologique reste d’utiliser autant que possible du sable et du gravier plutôt que du sel. De cette façon, ils éviteront de polluer les eaux ainsi que d’abîmer les structures de béton et de métal autour de leur propriété. Quant aux municipalités, au-delà des meilleures techniques de gestion et d’épandage des sels de voirie, ne serait-il pas plus profitable d’imaginer des solutions à long terme? Pourquoi ne pas repenser nos modes de déplacement hivernaux? On pourrait, par exemple, imaginer des réseaux de pistes de raquette, de patin et de ski de fond en ville (une piste cyclable = une pistes skiable?), ou encore l’utilisation de véhicules montés sur skis ou sur chenilles... Sortons nos Joseph-Armand Bombardier des placards! == Extrait du numéro de décembre 2008 du journal l'Infobourg