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Par Nadine Davignon Au cours des derniers mois, la pénurie de places en garderie a fait l’objet de plusieurs reportages dans les médias québécois. L’Infobourg a voulu prendre le pouls de cette réalité au centre-ville de Québec. Le cirque quotidien C’est dans un infernal tourbillon de listes d’attente, d’appels téléphoniques et d’inquiétudes, que se plonge la majorité des nouveaux parents. Ils se résignent à plusieurs acrobaties pour faire garder leur poupon. Mélanie et son conjoint, qui habitent et travaillent au centre-ville, ont déniché une rarissime bonne place… à Beauport. Matin et soir, ils louent une voiture Communauto afin de faire le trajet entre leur travail et la garderie. Les journées sont réglées au quart de tour, d’autant plus qu’ils ont un autre enfant qui fréquente l’école primaire du quartier. Également résidante de Saint-Jean-Baptiste, Isabelle doit reconduire son enfant en voiture dans une halte-garderie de Sainte-Foy, trois jours par semaine. Elle comble les deux autres journées en engageant une gardienne à domicile, solution très coûteuse. Là aussi, le casse-tête de la garde de son enfant a ajouté un stress à l’horaire déjà chargé. Pour la famille de Luc et Marie, la meilleure solution a consisté à déménager plus près des deux lieux de garde de leurs enfants, dans Saint-Sauveur. Enfin, chez Ricardo et Mylène, étudiants, on s’est résolus à organiser l’horaire des études de manière à ce qu’un des deux parents soit à la maison, en alternance. Des chiffres Qu’en est-il réellement du nombre de places disponibles? Selon les plus récentes données du ministère de la Famille et des Aînés, il y aurait actuellement 18 738 places dans la région de la Capitale-Nationale. Les besoins seraient cependant beaucoup plus élevés. Le nombre d’inscriptions sur la liste d’attente centralisée indiquerait qu’à Québec, jusqu’à sept fois plus d’enfants auraient besoin d’une place! Même si le système n’est pas parfait, l’inscription sur une liste centralisée permet heureusement de soulager à la fois les parents et les responsables de services de garde. « Chaque semaine, je reçois quand même deux ou trois appels de parents qui cherchent désespérément une place », relève Sylvain Bouchard, directeur du CPE Saint-Jean-Baptiste. M. Bouchard explique que les habitants du centre-ville semblent moins bien desservis que ceux des autres secteurs de la région. En effet, dans les quartiers du Vieux-Québec, Saint-Jean-Baptiste et Saint-Roch, pas moins de quatre CPE sur neuf sont pratiquement réservés aux employés des institutions (ministères, municipalité de Québec, palais de justice, SAAQ, etc.), où ils sont installés. Pour le ministère de la Famille et des Aînés, le « taux de couverture » du centre-ville est suffisant, mais dans les faits, plusieurs dizaines de places ne sont pas accessibles aux parents des quartiers centraux. M. Bouchard souligne toutefois que le problème principal est le manque généralisé de places. Par ailleurs, la pénurie oblige bien souvent les parents du centre-ville à modifier considérablement leur mode de vie. Elle les contraint à utiliser une automobile pour rejoindre la garderie, la durée des trajets d’autobus étant prohibitive. Du côté des services de garde en milieu familial, le portrait n’est pas tellement plus encourageant. Au centre-ville, certaines places ne sont carrément pas offertes, faute de personnel. Le métier d’éducatrice est exigeant et les conditions de travail ne sont pas des plus attirantes. L’éducatrice doit en premier lieu disposer d’un espace adéquat dans sa résidence pour recevoir les bambins. Pas toujours facile au centre-ville! La plupart des travailleuses gardent un maximum de six enfants une dizaine d’heures par jour. Le salaire actuel est de 26 $ par jour par enfant, montant duquel l’éducatrice doit retrancher ses dépenses (nourriture, assurances, matériel, etc.) puisqu’elle est travailleuse autonome. Des solutions? Tout le monde semble d’accord pour dire que la première solution est l’ajout de nouvelles places. Selon M. Bouchard, il serait cependant réalistement impossible d’offrir des places à contribution réduite (7 $) pour tous les petits Québécois. De son point de vue, les garderies privées ne sont pas une voie à privilégier, puisque les coûts pour les parents sont élevés, que la qualité des services n’est pas toujours au rendez-vous et que les conditions de travail sont souvent plus difficiles pour les éducatrices. Davantage d’encadrement et de surveillance seraient d’ailleurs souhaitables dans ces garderies. En attendant l’octroi de nouvelles places, le directeur du CPE Saint-Jean-Baptiste dit avoir des projets. En se regroupant avec d’autres collègues, il souhaite travailler an amont et saisir les occasions qui pourraient se présenter prochainement. Du côté des parents, certains s’entraident et échangent des journées de gardiennage sur une base hebdomadaire, d’autres mettent entre parenthèses leurs projets de carrière ou d’études afin de rester à la maison. Ironie du sort? Le réseau public de garderies a été mis sur pied il y a une quarantaine d’années. À l’époque, des groupes de parents très motivés ont mis l’épaule à la roue afin de se doter de services adéquats. Malgré le besoin criant de places en garderies, il ne semble pas exister de mouvement de solidarité semblable chez les parents d’aujourd’hui, pourtant eux-mêmes issus des premières cohortes d’enfants ayant fréquenté les garderies québécoises. Note : Au moment de mettre sous presse, les conventions collectives n’étaient toujours pas signées. Les nouvelles ententes de travail prévues entre la CSN, la CSQ et le gouvernement prévoient (en 2013) une rémunération de 34,43 $ par jour par enfant. == Extrait du numéro du printemps 2011 du journal l'Infobourg.