(La rédaction) Le 10 avril dernier, plusieurs groupes en défense collective des droits (DCD) étaient rassemblés devant le 425, rue Jacques-Parizeau pour réitérer leurs demandes à la ministre responsable de la Solidarité sociale et de l’Action communautaire, Chantal Rouleau. Encore une fois, les groupes en DCD ont été oubliés lors du dernier budget provincial déposé le 12 mars dernier : aucun nouveau financement pour 2024-2025 n’est prévu, tout comme aucune indexation aux subventions actuelles.

La défense collective des droits, ça sert à quoi ?

Pendant que la population vit une précarité de plus en plus visible et que les mesures gouvernementales sont insuffisantes pour y faire face, les organismes
en DCD luttent pour que les droits sociaux de tous·tes soient reconnus et respectés. Ils luttent aussi contre les structures qui créent les inégalités avec des ressources limitées.

Qu’il s’agisse de l’explosion des prix des denrées, de la crise du logement, de l’isolement ou encore du manque d’accès aux soins de santé, toute la population est touchée par l’inaction gouvernementale. Le gouvernement compte sur les groupes en DCD pour venir rattraper son désengagement dans les sphères sociales.

Or, année après année, les groupes, en plus d’être sous-financés, s’appauvrissent et peinent à répondre aux demandes et à leur rôle : combattre les structures qui créent les inégalités, défendre les droits de tous·tes, créer des milieux favorisant la participation de toutes les personnes au débat public et politique, etc. Les groupes assurent leurs fonctions notamment par l’analyse du discours politique, avec une approche d’éducation populaire, de mobilisation sociale et de représentation.

Un enjeu féministe

Non seulement le sous-financement a des impacts sur la mobilisation, les conditions de travail et la vie associative, mais ses effets sur la santé des travailleur·se·s sont notables. En effet, dans le milieu communautaire, en général, 8 salariées sur 10 sont des femmes, selon le Centre de formation populaire et relais-femmes (2005).

En 2021, l’Observatoire de l’ACA rapportait que 89 % des équipes de travail des organismes d’action communautaire autonome souffraient de fatigue ou d’épuisement.

Trois revendications primordiales

Dans le cadre de la campagne Les droits ça se défend, collectivement! portée
par le Regroupement des organismes de défense collective des droits (RODCD), les groupes en DCD revendiquent actuellement 154 millions supplémentaires annuellement pour réaliser leur mission (incluant 1,4 million pour la participation des personnes avec des limitations fonctionnelles). Le montant a été calculé à la méthode des seuils planchers du Réseau québécois de l’action communautaire.

autonome (RQ-ACA). C’est 70 % de ce montant qui serait accordé à la masse salariale et 30 % aux autres dépenses de fonctionnement, que ce soit le loyer, le matériel, les frais d’activité, de communications, etc.

Pour répondre à la hausse des frais de fonctionnement et du coût de la vie, les groupes en DCD demandent également une indexation de 3,6 % pour 2024, en se basant sur l’indice des coûts de fonctionnement du communautaire.

Finalement, une autre revendication portée par les groupes en DCD est l’établissement d’un processus transparent pour accueillir les groupes en attente de financement et demander que leurs besoins soient mieux documentés. Les groupes revendiquent ainsi l’ajout d’une enveloppe permanente pour financer les nouveaux groupes.

Une question de volonté politique

Même si ce montant de 154 millions peut paraître élevé, il est nécessaire de se rappeler que les groupes sont, tout d’abord, essentiels au filet social qui s’effrite à cause de l’inaction gouvernementale actuelle.

Il s’agit aussi de choix politiques. La CAQ préfère favoriser les intérêts individuels que de favoriser les biens collectifs. Par exemple, les baisses d’impôt annoncées par la CAQ dans le budget de 2023-2024, pour les personnes faisant plus de 100 000 $ par année, totalisent une perte de 1,85 milliard annuellement de fonds publics. Il est aussi plus facile pour le gouvernement de vouloir aller de l’avant avec un projet de tunnel autoroutier au coût de 10 milliards et destructeur sur tous les plans que de permettre à des organismes communautaires de répondre aux nombreux besoins de la communauté.

Ajoutons qu’en 2022, pour la première fois, une ministre a été nommée responsable de l’action communautaire autonome. Or, aucune action concrète n’a été entreprise de sa part.

Dans les dernières années, les groupes en DCD ont eu quelques avancées majeures, notamment en 2019 où ils ont subi un rehaussement de leur financement après plusieurs années de mobilisation. C’est pourquoi les groupes en DCD maintiendront la pression auprès du gouvernement pour que celui-ci réponde à leurs demandes, qui sont légitimes et nécessaires.

La défense collective des droits encore oubliée