Par Marie-Ève Duchesne

En pleine rentrée parlementaire, alors que les crises du logement locatif et de l’itinérance continuent à s’approfondir, le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) a installé à proximité de la colline Parlementaire à Québec un camp d’une ampleur inégalée dans son histoire. Plus de 200 personnes en provenance de différentes régions se sont installées les 14 et 15 septembre derniers au parc de l’Amérique française. Elles ont voulu ainsi faire entendre la voix des mal-logé·e·s au gouvernement Legault, jugé en partie responsable de l’aggravation de la situation

Alors qu’un nombre considérable de ménages locataires étaient toujours sans bail ou en recherche active de logement au 1er septembre 2024, deux mois après la période intensive des déménagements, le camp se voulait un symbole de l’itinérance, de l’insécurité résidentielle et du mal-logement qui sont autant de symptômes des crises sociales en cours. Personnes mal logées, familles, personnes racisées, précaires, de la classe moyenne, en situation de handicap, aîné·e·s, travailleur·se·s communautaires et campeur·se·s ont représenté la diversité des personnes touchées ou susceptibles de l’être par la crise du logement. Alors que le loyer moyen atteint maintenant 1 022 $ par mois au Québec et qu’il s’élève à 1 962 $ pour les logements disponibles, le FRAPRU déplore que de plus en plus de locataires soient affecté·e·s et se voient ainsi nier leur droit au logement. « Dans ce contexte, l’absence d’alternatives au marché privé de l’habitation contribue à la dureté de la crise et c’est à cela que l’État peut remédier en renforçant le filet social », explique Véronique Laflamme, la porte- parole du FRAPRU.

Le logement social et communautaire représente la formule la plus complète et la plus permanente d’aide au logement, celle dont les retombées sociales et économiques sont les plus importantes. Or, le gouvernement québécois refuse de se fixer des objectifs clairs de développement pour les prochaines années, malgré les demandes répétées de nombreuses organisations sociales, communautaires et municipales. Le FRAPRU s’explique mal ce positionnement de l’administration de François Legault. Selon l’organisme, pour sortir durablement de la crise, il faut augmenter massivement le nombre de logements sociaux et communautaires, qu’ils soient gérés par des offices d’habitation, des coopératives ou des OSBL d’habitation. Il presse donc le gouvernement de se donner l’objectif de faire passer le parc de logements sans but lucratif, qui ne représente actuellement que 10,5 % de l’ensemble du parc locatif au Québec, à au moins 20 %, d’ici 15 ans.

Et dans le faubourg ?
Profitant de ces deux jours d’actions, en plus d’y participer activement, le Comité populaire Saint-Jean-Baptiste a tenu une action locale pour revendiquer du logement social sur le site du stationnement face au 640, rue Saint-Jean. Une construction qui illustre le besoin de logements sociaux ainsi que différentes bannières et pancartes ont envahi le terrain le temps de l’action. Cette action s’inscrivait dans une initiative de « commandos de quartiers » visant à illustrer les différents besoins locaux. Des actions ont aussi eu lieu dans Sainte-Foy, Maizerets, Saint-Sauveur et sur la colline Parlementaire.

Le droit de manifester « à l’honneur » pour ces deux journées
La Ligue des droits et libertés section de Québec (LDL-Qc), la Coalition pour le droit de manifester à Québec et le FRAPRU ont tenu à dénoncer les multiples dérapages du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) dans son encadrement des manifestations, particulièrement lors de ces deux jours. Les réactions ont été vives sur le terrain, au lendemain du campement, alors qu’on a encore une fois constaté de multiples écarts du SPVQ. Menace d’interdiction de manifester, menace de remise de constat d’infraction, attitude condescendante, intimidation, la liste des récriminations des groupes présents ne cesse de s’allonger. Pour la Ligue des droits et libertés section de Québec (LDL-Qc), la Coalition pour le droit de manifester et le FRAPRU, l’encadrement policier de la fin de semaine illustre une fois de plus que le règlement municipal actuel est clairement abusif, d’autant que l’administration Marchand laisse carte blanche au SPVQ dans ses méthodes d’application.

Le FRAPRU "Campe" à Québec