Par Anne-Sophie Trottier 

Photo : courtoisie 

Le 23 octobre dernier avait lieu la séance de consultations sur l’avenir de l’îlot Dorchester, organisée par la Ville de Québec. Le terrain, actuellement dédié au stationnement (350 cases), est visé par un mégaprojet résidentiel et touristique conçu par le propriétaire, le groupe Trudel. Celui-ci projette la construction de cinq bâtiments sur l’îlot. Ils incluent du logement, des locaux commerciaux, un hôtel et plusieurs étages de stationnement souterrain. Le projet comporte aussi deux placettes vertes, dont l’une se situe au coin Dorchester/Saint-Vallier. Un bel endroit pour relaxer en se berçant aux doux sons de l’autoroute. 

La Ville devait prendre le pouls de la population à ce sujet étant donné que la mouture actuelle demande plusieurs exemptions aux normes en vigueur. 

La salle du 155, boulevard Charest, qui accueillait la rencontre, était à pleine capacité bien avant que la réunion ne débute ; plusieurs citoyen·ne·s ont dû s’installer dans la « salle de débordement » et regarder les présentations sur un écran. 

La présentation s’est faite en deux temps : d’abord, une employée de la Ville expliquait les normes d’urbanisme en place dans le secteur à travers le programme particulier d’urbanisme (PPU) et le zonage. Ce sont ces règlements qui déterminent la hauteur possible d’un immeuble, les usages autorisés d’un terrain, le pourcentage de verdure qui doit être incorporé à un projet, etc. 

La Ville montrait ensuite les modifications demandées par le groupe Trudel. Celles-ci visaient surtout l’augmentation des hauteurs et surhauteurs des bâtiments, l’inclusion d’un plus grand nombre de locaux commerciaux ainsi que la diminution des pourcentages de verdure au sol. La demande qui a fait le plus réagir concernait la modification de la norme de surhauteur pour le bâtiment le plus élevé, passant des cinq mètres autorisés à 26 mètres. C’est dans ce bâtiment que la construction de l’hôtel est prévue. 

Ensuite, David Chabot et Mathieu Forget du groupe Trudel ont présenté le projet, intitulé Respect et ambition pour Saint-Roch. Selon eux, le PPU rend tout projet à l’îlot impossible étant donné sa rigidité. Fort de nombreuses consultations effectuées dans le quartier, le groupe Trudel est en mode séduction. L’accessibilité sociale de leur projet est présentée comme étant l’une de leurs priorités, mais le jupon dépasse à bien des égards. 

Au moment d’écrire ces lignes, aucun logement n’est prévu pour accueillir des familles. Les espaces de stationnement, au nombre de 550, auront tôt fait de créer une importante circulation de transit dans les quartiers centraux. Pour ce qui est du logement social, il n’y en a pas. Trudel prévoit 40 unités de logement dit « abordable* » qui, on le sait, ne correspondent pas à la capacité de payer des ménages les moins bien nantis. 20 unités de PSL (Programme de supplément au loyer) ont été octroyées pour le projet par l’Office municipal d’habitation de Québec (OMHQ). Cette entente fait en sorte que les locataires des logements visés par cette entente paieront 25 % de leurs revenus pour se loger, comme en HLM. La différence face au loyer régulier sera payée à Trudel par l’OMHQ. Ainsi, des fonds publics serviront à enrichir ce promoteur privé, qui restera le propriétaire des logements. Il faut aussi comprendre que ces ententes sont à durée déterminée. Ainsi, après un certain nombre d’années, Trudel ne sera plus tenu d’offrir des loyers aux personnes à faible revenu. 

Ainsi, malgré les annonces en grande pompe, aucune solution pérenne pour répondre aux besoins les plus criants de la communauté en matière de logement n’a été présentée. 

Sans oublier que l’hommage prévu à Paryse Martin, artiste multidisciplinaire bien-aimée du quartier Saint-Roch et décédée au cours de la dernière année, a été conçu sans le consentement de sa famille**. 

Pour la suite, Trudel procédera à certains ajustements suite aux consultations et mémoires citoyens qui auront été déposés. Ensuite, la Ville verra si elle consent aux assouplissements demandés au PPU. Si c’est le cas, cela mènera à une autre série de consultations, et potentiellement à un référendum sur la question (si les citoyen·ne·s en font la demande). L’Engrenage St-Roch, accompagné d’autres organismes et de personnes mobilisées, reste à l’affût des futurs développements. 

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le mémoire de l’Engrenage sur son site web : https://www.engrenagestroch.org/actualites/ memoire-sur-le-projet-de-reamenagement-de-lilot-dorchester-par-trudel/ 

* Le logement abordable est calculé à 30 % du revenu médian des locataires du marché, ce qui équivaut à 1 027 $. 

** Simon Bélanger, « Hommage à Paryse Martin à l’îlot Dorchester : la famille n’était pas informée », MonSaintRoch, 29 octobre 2024, https://monsaintroch.com/2024/ hommage-a-paryse-martin-a-lilot-dorchester-la-famille-netait-pas-informee/ 

Petite chronique sur l'îlot Dorchester